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Entre nous - Edito

Saurons-nous à nouveau, un jour, allaiter?

Entre nous - C'est la lecture d'un article paru dans un hebdomadaire télé qui m'a inspiré la réflexion suivante: en France, saurons-nous à nouveau un jour, allaiter?

 

Avertissement: si nous sommes dans le respect total du projet d'allaitement de chaque maman, et si nous préférons et de loin, focaliser notre temps et notre énergie à aider les mères dans leur projet, et non à forcer à ce que toutes les mamans allaitent et longtemps, il y a parfois matière à pousser un "coup de gueule"; alors pardonnez-moi:-) vous verrez d'ailleurs que l'industrie infantile lorsqu'elle est évoquée, se fait épingler également en ce qui concerne l'alimentation au lait infantile.....

Ce coup de gueule est très ancien, à replacer dans son contexte.

Il date de ...... 2000!

 

 Il y a eu une émission télévisée sur France 2 le samedi 28 octobre 2000: "les grandes énigmes de la sciences" dédiée au comportement des grands singes, cousins de l'homo sapiens sapiens que nous sommes.

Cette émission fut mise en avant dans un hebdomadaire télé, par la journaliste Marie-Claude Chane-Tune; une phrase a induit un choc en moi, en voici l'extrait, dont j'espère en avoir le droit de citation:

"La naissance de Mandy au début de l'année avait constitué un événement extraordinaire. Malheureusement, Manis, sa mère biologique, l'a délaissé. Sans doute, explique Françoise Delord, parce que c'était son premier petit et qu'elle même avait été élevée au biberon par des hommes".

Voilà une phrase clé, qui induit en moi deux réflexions:

A la suite de deux générations de femmes qui n'ont pas donné le sein, dont une partie a été enjointe à ne pas allaiter! répétons-le pour seule information, comment envisager que les femmes, les mères, d'aujourd'hui, réussissent à allaiter alors qu'elles n'ont pas de modèle? et: est-ce que nous parviendrons à nouveau à allaiter dans la joie et l'harmonie que seules quelques mamans connaissent?

Pourquoi n'avons-nous plus de modèle en France?

  • Nos mères n'ont pas allaité, ou nos grands-mères n'ont pas allaité,
  • Nos tantes, nos soeurs n'ont pas allaité
    Nous n'avons pas de modèle! 
  • Si on regarde, en 2017 mes propres enfants ont 20 ans, je pourrai aider leurs compagnes si elles optent pour l'allaitement, parce que je me suis formée ; les mamans que j'ai aidées dans les années 1998 1999, pourront un peu aider leurs filles-belles-filles; mais toutes les Millenials ne pourront être aidées ni pleinement ni beaucoup par leurs mères, tantes, et grands-mères ("moi") et arrières-grands ("ma mère")
  • Il reste bien ancré ce gros problème induit par les industriels de l'alimentation infantile: il y a trente ans, les industriels ont créé des formules de lait de vache modifié, et ont dit aux mères: voilà, on a mieux que le lait maternel, donnez nos laits; les industriels ont même qualifié leurs produits de "lait maternisé" ou "lait humanisé", ce qui avait pour but de décrire la (soi-disant) supériorité de leur produit par rapport au lait maternel. Cette pression fut très lourde, au point que:
    • les termes "lait maternisé", "lait humanisé" durent être interdits internationalement (Code International des Substituts du lait maternel),
    • mais surtout: de nombreux professionnels de la santé et de nombreux parents pensent encore que le lait industriel est supérieur au lait maternel.
    • Et malheureusement, il est difficile d'informer et de faire prendre conscience de ce que: le lait matenrel est supérieur au lait de vache modifié, en ses qualités nutritives, en ses qualités thérapeutiques, en ses vertus d'adaptation au métabolisme de l'enfant en temps réel, et comme ce n'et pas le propos, je clorerai là la liste.
  • Une méconnaissance bien ancrée des éléments pour mettre en place la lactation.
    Savez-vous qu'on donne encore dans de nombreuses maternités un biberon d'eau sucrée, même aux enfants qui vont être allaités? alors qu'on sait bien que ce biberon d'eau risque d'induire une confusion sein/tétine et une paresse suffisante en un seul biberon, à détourner l'enfant du sein, sans compter que les calories du sucre et le poids de l'eau vont tasser l'enfant, lui dilater l'estomac, et le repaître (donc mis au sein, il ne stimulera pas la glande mammaire, se contentant de tétouiller sans stimuler)
  • [On complète surtout très facilement sans chercher à pister le problème, et sans faire appel aux seins de la mère - le tire-lait existe quand même!!]
    Savez-vous qu'on va parfois voir des mères pour leur tater les aisselles, toutes les trois heures, et qu'on repousse les mises au sein parce que les ganglions ne gonflent pas? d'une part, les ganglions des aisselles ne gonflent pas chez toutes les femmes, et si on ne met pas les enfants au sein, les seins ne gonflent pas!
    Entre autres, ces méconnaissances remontent à il y a 30-50 ans! on croyait et à tort, que les enfants risquaient l'hypoglycémie à leur naissance et qu'il fallait leur donner un biberon d'eau sucrée (et attendre 24h les mises au sien pour les faire jeûner!)
    Je vais arrêter là la liste des bêtises encore en cours. Je pense ouvrir un dossier sur les "mauvais conseils distillés par ci par là...."

  • Une méconnaissance générale de la lactation
    Les mamans sont dans la chambre de maternité, et leur maman arrive; oh mais tu es sure d'avoir assez de lait? et de donner dans les mauvais conseils... sans parfois le vouloir d'ailleurs!
  • On a un autre souci: c'est la mé-reconnaissance du lait maternel par les professionnels de la santé, certains disent que c'est par intérêt purement financier, et il faut informer que les maternités, par exemple, touchaient une certaine somme par accouchement, de la part des fabricants de lait industriels.
  • pour les professionnels de la santé, toujours, le fait que leurs cabinets soient "bardés" placardés de cadeaux: gobelet à stylo de telle marque de lait, post-it de telle marque de lait, sans compter les dépliants sponsorisés par telle marque de lait, ou les opérations commerciales publicitaires: à partir de telle date, tel lait s'appellera "lait chose",
    tout cet étalage de produits marqués n'incite qu'à mieux connaître les substituts du lait maternel. 

  • Il semble y avoir une volonté de faire croire que les femmes qui choisissent le biberon seraient culpabilisées par leur choix, et là le hic: on induit volontairement la croyance à la culpabilité de ces femmes, et la conséquence est qu'on tait les informations sur l'allaitement.
  • "Chut, elles n'ont pas donné le sein, alors n'en parlons pas.
    Et les autres?
    qui, les autres?
    et bien, celles qui veulent allaiter! oh elles, qu'elles se débrouillent, allez un mois et basta on les fait mettre au pas-heu non, au biberon!
  • Le plus étonnant, est que, à part des mamans qui n'ont pas allaité par manque d'informations (des mamans césarisées, des mamans de jumeaux, auxquelles on n'a pas dit qu'elles pouvaient parfaitement donner le sein),
  • si on demande aux mamans: vous êtes contente de donner le biberon? elles répondront par l'affirmative. Vous ne regrettez rien? Non! Vous vous sentez coupable? Non!
  • Certaines disent: allez, pour mon troisième, j'aimerais allaiter, connaître cela une fois dans ma vie (entendu chez une presque voisine). Mais, est-ce que je risque pas de léser mes premiers enfants qui n'ont pas été allaités? (Non, bien sûr!!!)
  • Les femmes qui travaillent, et la croyance qu'elles ne peuvent allaiter, est un problème également. Si la SMAM 2000 a pour but entre autre: allaiter et travailler c'est votre droit,  c'est bien dans le but de protéger l'allaitement au sein.

  • L'autre souci dans ce diagnostic, concerne les magazines: même informés, par une association par exemple, les informations distillées restent incomplètes. Soit on peut lire un placard en gros caractères: les crevasses-pour donner envie de donner le sein, il y a mieux! si vous avez moins d elait, donnez du lait industriel-pour avoir MOINS de lait, donnez du lait industriel! ou alors les informations sont erronées: lu récemment: au-delà de 9 mois l'allaitement au sein est pur plaisir. Mais enfin, est-ce qu'on sèvre un bébé de 9 mois de son biberon de lait industriel? non alors pourquoi nier l'allaitement au sein du bambin?????
  • J'ai d'autres constations amusantes mais crisantes, qui contribuent à rester avec une image de l'allaitement au sein un peu plus fréquente certes en cette année 2000, mais toujours avec une mauvaise réputation! (oui, on voit plus d'allaitement au sein à la télé en cette fin de siècle, mais on lui trouve toujours des défauts, à ce lait, il est pollué, il donne des crevasses......
    Le manque de connaissance de l'allaitement par notre entourage induit des rumeurs: l'allaitement fait tomber les cheveux;

 

Est-ce que la situation est réversible? saurons-nous à nouveau un jour, allaiter?

 

Il y a un cas (non documenté) où une maman grand singe jeune accouchée ne savait pas comment donner le sein; apparemment, encore une maman nourrie au biberon quand elle était petite; HEUREUSEMENT, un membre de l'équipe eut l'idée géniale: faire venir une jeune mère humaine, qui allaita son bébé devant la cage de l'hominidé. Et la maman grand singe imita la maman humaine, la maman grand singe donna le sein à son petit.

Alors je me dis que: si les femmes qui allaitent, qui en sont heureuses, épanouies, comme l'étaient les femmes "avant", se montrent, osent se montrer, osent donner le sein hors de chez elles, si elles osent dire qu'elles donnent le sein et qu'elles gardent parfois leur petit avec elle, si elles osent dire que c'est un plaisir de sentir son petit téter puis quitter le sein repu, dans un soupir d'extase.... je me dis que nous avons une chance de diffuser ces moments d'amour et de lait, de les faire connaître.

J'ose aspirer à une société où les journalistes quitteraient leur partialité en matière d'allaitement, où les magazines parleraient d'allaitement comme les associations le font, où les industriels du lait infantile cesseraient leurs pressions médiatiques, et déjà: respecteraient le corps des enfants qu'ils nourrissent par choix de la mère: avant six mois, l'appareil digestif de l'enfant n'est pas prêt à  absorber autre chose que du lait, pas de céréales, ni farine, ni jus de fruits! où les cadeaux naissance ne seraient plus des uniques publicités à lait industriel, mais contiendraient aussi des informations sur le sein, comme la publication gratuite du Comité National Français de la Santé; ou les cadeaux financiers ou matériels au label des substituts de lait maternel n'existeraient plus; où les guidances de mises au sein diffusées en maternité ne seraient plus sponsorisées par les fabricants de lait qui induisent un passage obligé vers le sevrage par leur existence et/ou leur contenu.....

Le modèle de cette maman grand singe est magnifique. J'espère que les autres professionnels animaliers s'en serviront: à chaque nouvelle naissance de grand singe par exemple, faire venir uen maman qui allaite, pour donner l'exemple.

Chaque fois que j'arrive à aider une maman, à la soutenir, surtout quand les mamans me recontactent après, et me disent: ça va mieux! effectivement, j'ai paniqué, mais vous avez confirmé ce que je ressentais un peu au fond de moi, alors je me dis: allez, voilà une maman épanouie! c'est merveilleux! Et je me dis: ce que je lui ai dis, peut-être qu'un jour, elle le redira à une autre maman en difficulté!

Nous pouvons enfin espérer en une inversion de la tendance française en nous basant sur les modèles norvégiens, par exemple; ce pays a vécu également la proposition du choix: sein ou biberon, et le taux d'allaitement était tombé bien bas; il chutait très vite pour les femmes qui avaient choisi de donner le sein; cela tendrait à nous rappeler notre France, n'est-ce pas?

Cependant une association Ammehjelpen créée par des professionnels de la santé a choisi de relancer l'information de l'allaitement, permettant l'information des femmes, et des praticiens, et a su agir auprès du gouvernement en matière de publicité de substituts du lait maternel par exemple (don't on sait que cette publicité pousse à donner des biberons); également, l'initiative Hôpitaux Amis des Bébés est active. La France devrait suivre cet exemple, la Norvège est un pays libre, où les femmes ont un poids bien plus stable et bien mieux établi qu'en France, c'est un pays où allaiter est une évidence de presque 100% à la naissance (98%), 80% à 3 mois, 60% à 12 mois (chiffres 1997-les dossiers de l'obstétrique).

Il ne s'agit pas de pousser à l'allaitement, mais en informant totalement les (futures) mères des vertus du sein, des étapes, du rôle nourricier, en parlant des joies des tétées, les femmes seraient plus nombreuses à tenter l'aventure, et pourquoi pas, à continuer....

Cet édito est ancien, il date de 2000, en réaction à un article de journal. Regardez sur les chaînes animalières, tous ces animaux nourris au biberon....

Même certains animaux n'ont pas assez de lait ; c'est facile, aussi bien dans les parcs, zoos, que certaines fermes, on ne veut pas "perdre" le nouveau-né, alors on intervient; dans le travail dans l'accouchement de la femelle.... on touche à son petit..... et on intervient au moment où elle pourrait s'attacher à son petit.....

De fait, certaines femelles rejetteront carrément leur enfant; d'autres le nourriront, à la mamelle, mais "perdra" de son lait parce qu'elle le repousse, refuse de le nourrir aussi souvent qu'il le voudrait....

J'ai eu un exemple, en 2006 ou 2007, de croiser un cirque; il s'était installé à 100 mètres de chez moi, et c'est en entendant rugir un lion en pleine nuit que j'ai cru devenir ... dingue; le lendemain, j'ai eu confirmation que je n'étais pas [encore] folle, un cirque s'était installé;

Il y avait notamment une lionne qui avait accouché peu de temps auparavant, et l'un des responsables du zoo m'a confié que lorsqu'ils avaient senti que le moment allait venir, ils avaient laissé de quoi manger dans sa cage, puis qu'ils l'avaient fermée, "claquemurée" avec ces plaques métalliques... ils avaient suivi la naissance totalement à distance, avaient laissé cette nouvelle famille tranquille durant plusieurs jours (ils passaient la nourriture pour la mère très rapidement et tout doucement, sans rien toucher).... plus tard, ils avaient "ouvert" les volets métalliques, de plus en plus longtemps.....

Un bel exemple, quoi!

Mais pour en revenir à l'illustration chez l'humain: pourquoi autant de crevasses chez les femmes? la très grande majorité des crevasses provient d'une mauvaise position, et/ou d'une mauvaise prise en bouche; pourquoi? parce que les mères d'aujourd'hui ont rarement eu l'occasion de voir des femmes allaiter sans problème...

De nombreuses mères donnent le sein alors que le bébé est en position de don de biberon.... forcément ça finit en crevasses et en perte de poids car le sein est "tordu" et que ça s'écoule moins bien, et que l'enfant étant moins confortable, ne va pas au bout de sa tétée......

J'ai eu des contacts avec des médecins vivant en Afrique, Afrique du Nord, Afrique dite Noire, qui s'inquiétent des taux diminuant d'allaitement maternel dans leurs pays; pour le moment, ça va, ces femmes qui n'allaitent plus depuis le début des années 2000, les femmes qui allaiteront à nouveau dans les années 2010 et suivantes, pourront bénéficier d'un large modèle bien répandu; mais si on saute une génération, ça deviendra plus dur.... car on retrouve dans ce nouveau comportement, des phrases et doutes qu'on a entendus il y a quelques dizaines d'années en France: ton lait n'est pas assez riche, tu manques de lait.....

et pour en revenir à notre situation: plus nous aidons les mères à vivre leur projet d'allaitement, plus nous les aidons, plus nous avons de chances qu'elles vivent leur projet jusqu'au bout; et qu'elles puissent, à leur tour, donner un petit coup de main à leurs amies, nièces etc ne serait-ce que dans la prise en bouche du sein.... ça prendra du temps, beaucoup de temps, mais leurs filles allaiteront peut-être, elles seront aidées par leurs mères si ces dernières ont vécu pleinement leur projet, quelqu'ait été la durée de leur projet; cela nécessite un véritable travail en réseau, et parfois, faire le geste d'aller en consultation non remboursée, un investissement qui vous aide à repartir du bon pied, et à transmettre les messages autour de vous, et plus tard, à vos filles ou aux partenaires de vos fils.